La situation en Andalousie
Dans les provinces d’Almería et de Huelva, au sud de l’Espagne, s’étend l’un des plus grands bassins de production agricole d’Europe. Surnommée « la mer de plastique », cette région couverte de milliers d’hectares de serres alimente les marchés européens en fruits et légumes tout au long de l’année. Ce modèle agricole intensif repose cependant sur la surexploitation des ressources naturelles et sur une main-d’œuvre migrante majoritairement précaire, souvent sans papiers et sous-payée.
Faute de politiques publiques adaptées en matière de logement et de protection sociale, des milliers de travailleurs et travailleuses vivent dans des campements informels appelés « chabolas », construits à partir de déchets agricoles, à proximité des zones de production. Ces lieux abritent à la fois des travailleurs saisonniers et des résidents permanents, parfois installés depuis plusieurs années. Cette situation révèle la vulnérabilité extrême de populations indispensables à l’économie agricole andalouse, mais maintenues dans des conditions de vie indignes et privées de droits fondamentaux.
Pour plus de détails sur ce sujet, vous pouvez consulter ce document.
Conditions de vie
En effet, les journées peuvent durer 8 à 12 heures, pour des salaires compris entre 3,50 € et 5 € de l’heure, souvent sans respect des normes de sécurité ni de protection face aux produits chimiques.
Cette situation est renforcée par une exclusion administrative systémique. L’accès aux droits fondamentaux est entravé, et certains sont contraints de payer plusieurs centaines à plusieurs milliers d’euros (jusqu’à 8 000 €) pour obtenir des démarches ou des contrats sans garanties.
Les conditions de vie dans les campements sont alarmantes : absence d’eau potable, d’électricité et d’assainissement, aucun système de collecte des déchets, solutions de fortune dangereuses et risques sanitaires élevés.
Souvent isolés géographiquement, ces campements se situent à plusieurs kilomètres des services essentiels, nécessitant parfois jusqu’à trois heures de marche dans des zones sans transports publics ni sécurisation. À long terme, ces conditions ont des conséquences graves sur la santé physique et mentale, renforçant maladies, addictions, risques environnementaux et stigmatisation.
Femmes migrantes : une vulnérabilité extrême
Les femmes migrantes constituent la face la plus fragile et la plus invisible du système agricole andalou. Cumulant violences économique, sociale, administrative et de genre, elles vivent souvent isolées, sans papiers et séparées de leurs familles. Dans la province de Huelva, où l’agriculture est largement saisonnière, leur présence est particulièrement marquée, avec 800 à 1 000 femmes vivant dans les chabolas en basse saison. En l’absence de protection, de revenus suffisants et d’alternatives, certaines femmes se retrouvent exposées à des situations de prostitution ou de traite, souvent sous contrainte directe ou indirecte (pression économique, dépendance, menaces, réseaux organisés). Ces violences ont de lourdes conséquences sur leur santé physique et mentale, notamment en matière de santé sexuelle et reproductive, et renforcent leur invisibilité et leur exposition aux abus.
Axes d’intervention
Les associations locales jouent un rôle central auprès des populations vivant dans les campements agricoles. Malgré des moyens très limités, elles assurent depuis des années la distribution de biens essentiels, l’accompagnement administratif et juridique, ainsi qu’un soutien social, psychologique et linguistique. Leur connaissance fine du terrain et la relation de confiance établie avec les communautés en font des partenaires incontournables pour toute action durable.
1. Un appui ciblé sur les vulnérabilités des femmes
Face à une accumulation de risques spécifiques, l’intervention met l’accent sur la prévention, la sensibilisation et la protection des femmes migrantes. Cela passe par la distribution de biens essentiels liés à l’hygiène, à la santé sexuelle et à la sécurité, le renforcement des compétences des bénévoles sur les enjeux de genre et de violences, ainsi que la participation à la mise en place d’un espace mobile sécurisé dédié à l’écoute et à l’accompagnement.
2. L’amélioration des conditions environnementales et sanitaires
Les actions visent également à réduire les risques sanitaires et environnementaux dans les campements. Elles soutiennent le renforcement de la collecte et de la gestion des déchets, les initiatives locales de nettoyage ou de recyclage participatif, ainsi que la mise en place de points d’eau sécurisés. Des actions de sensibilisation à l’hygiène et à la santé environnementale sont menées, en particulier auprès des femmes et des jeunes.
3. Le van comme levier stratégique d’intervention
La mission exploratoire a mis en évidence un besoin logistique urgent. Les campements sont isolés, difficiles d’accès et nécessitent des déplacements réguliers que les bénévoles assurent aujourd’hui avec leurs véhicules personnels. Le van permet de faciliter l’accès aux zones reculées, d’assurer le transport de matériel humanitaire (kits d’hygiène, eau potable, matériel médical, lampes, etc.) et de créer un espace mobile sûr et confidentiel pour les entretiens individuels. Il renforce la présence de terrain, améliore la coordination entre acteurs et réduit les contraintes logistiques.
Dans un premier temps, l’intervention se concentre sur la province de Huelva, où la situation des femmes migrantes est particulièrement préoccupante, avant d’envisager une extension progressive à d’autres territoires.
Objectifs
La première année sera dédiée à l’acquisition et à l’aménagement d’un van humanitaire, outil central de l’intervention. Cet investissement initial, pensé sur le long terme, permettra d’augmenter progressivement l’efficacité des actions et de garantir un modèle pérenne et évolutif. Le projet vise avant tout à renforcer le travail des associations locales, sans se substituer aux actions existantes.
Le van permettra de répondre à des besoins opérationnels essentiels : amélioration de la mobilité et de l’accès aux campements, continuité de l’accompagnement social, juridique et psychologique, et soutien au développement de nouvelles activités.
Pour la première année, l’objectif est d’atteindre 100 bénéficiaires directs pour l’accès à l’eau potable et à la santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’environ 400 bénéficiaires à travers des actions de santé environnementale.
Les interventions seront menées en partenariat avec 1 à 3 associations locales, dans 10 campements, avec une priorité donnée à Lucena del Puerto et Palos de la Frontera, où les vulnérabilités sont les plus marquées.
